Catégorie : Chapeau
Chapeau : tête de chapitre
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13- Une société démocratique autonome veut dire aussi auto-limitée
Je pense qu’on peut poser deux principes simples :
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12- Le monde contemporain et le mythe de ce qui existe
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La pensée d’ ADORNO doit aussi être prise en compte : Theodor W. Adorno: (1903-1969) est un philosophe, sociologue, compositeur et musicologue allemand. En tant que philosophe, il est avec Herbert Marcuse et Max Horkheimer l’un des principaux représentants de l’École de Francfort, au sein de laquelle a été élaborée la Théorie critique.Adorno critique très sévèrement ce qu’il appelle « industrie culturelle » (terme qu’il préfère à celui de « culture de masse », impropre et trompeur dans la mesure où il laisserait entendre que les masses sont les vraies productrices de cette culture, alors qu’elles en sont, selon Adorno, les victimes) surtout la musique dite “populaire”. Il considère que la musique populaire moderne n’a plus rien de vraiment populaire, qu’il s’agit uniquement de produits conçus par de grandes entreprises pour une consommation de masse. Ainsi, pour lui les différences de goût et d’identité perçus dans la musique populaire ne proviennent que de l’aliénation et l’invention d’une fausse individualité, dans une société où toute vraie individualité est écrasée. Malgré son désir d’être considéré comme un marxiste, il propose une vision non-contradictoire des produits de l’industrie culturelle. Ses idées sur ces questions gardent une large influence dans les milieux universitaires aujourd’hui. Dans ses études sur la personnalité autoritaire, Adorno part de l’hypothèse selon laquelle les convictions politiques, économiques et sociales d’un individu forment un modèle cohérent, comme si elles étaient reliées par une mentalité ou un esprit qui est l’expression profonde de sa personnalité. Il cherche à comprendre comment certaines structures mentales conduisent à la formation de cette personnalité autoritaire, qui contient potentiellement le germe du fascisme.
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La véritable cause de l’antisémitisme est dans une forme de paranoïa, une forme de projection morbide qui conduit le sujet à attribuer à son objet ses propres pulsions tabous, et à les sacrifier, en même temps que cette haine dissimule une aspiration secrète. Tel est le mensonge du fascisme. Sous la pression économique, le système hallucinatoire devient une norme. La paranoïa un délire de masse. Il n’y a même plus d’antisémites professant une opinion politique, comme au XIXe siècle. Les individus ne choisissent plus ; ils ne font que se conformer à la hiérarchie sociale et à la culture de masse. La réaction ne s’adresse même pas aux Juifs en tant que tels. Les pulsions ont reçu une orientation, et les politiciens ont fourni un objet à persécuter. Le problème de l’antisémitisme tient plutôt dans la disparition d’une aptitude à former le jugement. Le progrès de la société industrielle a conduit à l’anéantissement de l’homme en tant que raison. C’est là que la dialectique de l’Aufklärung devient folie. L’avènement du national-socialisme conduit à se pencher, après 1933, sur la question du fascisme en même temps que la dérive stalinienne du communisme soviétique conduit à un doute généralisé sur l’orientation de la civilisation. L’espoir marxien d’une transformation de la société apparaît alors comme utopique. Horkheimer émigre aux États-Unis, et Adorno le rejoint en 1938. C’est là qu’ils entreprennent d’écrire un livre sur la « logique dialectique » Ils recentrent la question sur l’antisémitisme plutôt que sur l’exploitation du prolétariat. Ils se demandent « pourquoi l’humanité, au lieu de s’engager dans des formes humaines, sombre dans une nouvelle forme de barbarie ». Il s’agit, pour les auteurs, de présenter « l’intégralité de leur philosophie » en reconstituant l’histoire du processus de civilisation, en méditant sur « l’aspect destructif du progrès », en repensant le principe de raison, en tâchant d’expliquer la disposition des masses à se laisser fasciner par le despotisme, en expliquant le processus d’« autodestruction de la raison » et de « régression vers la mythologie ».
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Ils utilisent un certain nombre de catégories existantes :
* le concept des Lumières (Aufklärung) de Kant
* la dialectique philosophique de Hegel
* l’analyse du travail social de Marx
* la généalogie de la morale de Nietzsche
* la psychanalyse de la civilisation de Freud♥
Le livre est écrit et relu conjointement par les deux auteurs. Le travail d’écriture commence en 1942. Le manuscrit est achevé en 1944 et publié de façon confidentielle à New York avant de paraître à Amsterdam en 1947. En 1969, Horkheimer et Adorno proposent une nouvelle édition, à Francfort, en soulignant dans une nouvelle préface l’actualité de leurs thèses dans un monde où « les horreurs continuent » et où l’on assiste à des « renouveaux du totalitarisme ». Ils considèrent, en outre, leur livre comme une « critique de la philosophie » entendue comme refus d’adhésion au positivisme, c’est-à-dire au « mythe de ce qui existe ». Le monde contemporain est contradictoire car travaillé par les antagonismes du capitalisme. L’art authentique est celui qui rend compte de ce caractère conflictuel par la dissonance.
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11- Culture plus agriculture
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Pour Bernard CHARBONNEAU Culture et agriculture se confondent.
Bernard CHARBONNEAU: (né le 28 novembre 1910 à Bordeaux et mort le 28 avril 1996 à Saint-Palais) est un penseur français, auteur d’une vingtaine de livres et de nombreux articles. il évoque les grandes lignes de la permaculture quand il soutient que « l’agriculture peut résoudre les contradictions de la société industrielle ». Rétablir une agriculture, cela implique que l’essentiel du secteur agricole et forestier soit rendu à des paysans pratiquant la culture (et non l’exploitation) non épuisante des sols, en fonction des conditions locales, par l’assolement, l’amendement, le compost et le fumier, l’élevage de plein air. Le procédé mécanique ou chimique, sans être exclu par principe, ne peut être qu’un « rajoutis » dont seule l’expérience locale dira jusqu’où l’utiliser (…) sans nuire à la nature et à la qualité. Cela suppose que la priorité soit accordée au machinisme léger sur le lourd, au procédé naturel sur la chimie, à la polyculture sur la monoculture épuisante. Et que le paysan vivant sur et de sa terre, ni trop petite ni trop grande, remplace le prolétaire ou le capitaliste de l’exploitation agrochimique.(Charbonneau 1991, 181-2)
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Un avenir plus pauvre en pétrole pourrait, si l’on y consacre à l’avance assez de réflexion et d’imagination, être préférable à notre présent. Un futur plus sobre en énergie et plus résilient ne signifie pas forcément de jouir d’une qualité de vie inférieure à celle du présent. Au contraire, un avenir où l’économie locale serait revitalisée posséderait bien des avantages par rapport au présent, entre autres une population plus heureuse et moins stressée, un environnement amélioré et une stabilité accrue.(Hopkins 2010, 132-3)
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L’avenir relocalisé qu’envisage Charbonneau pour des raisons éthiques implique de même « l’association de l’industrie à l’agriculture » pour « aider les campagnes et les pays à revivre », sur la base « d’une autre technologie, plus légère, qui utiliserait l’eau sans la souiller, » à l’exemple des « moulins qui contribuent à l’agrément et à la stabilité des cours d’eau ». Une telle industrie aurait l’avantage de peupler l’espace en utilisant plus de main d’œuvre; si celle-ci n’est pas exploitée, exercer ses muscles et son habileté serait-il plus pénible que de presser à longueur de journée sur un bouton? Imaginons que l’on réintègre dans un travail personnel et diversifié la part de jeu que satisfait à grands frais l’industrie du loisir et des transports : au bout du compte on s’apercevrait peut-être qu’un travail industriel ainsi humanisé est autrement rentable et productif que la tâche totalement organisée; et l’on aurait mis fin à cette schizophrénie du travail et du loisir qui dissocie l’homme. Mais cette nouvelle industrie relèverait plutôt de l’artisanat, l’industrie lourde nécessaire, objet d’un service social, étant strictement cantonnée dans sa « zone industrielle ». Comment d’ailleurs pourrait-il y avoir une société locale sans artisans établis sur place?(Charbonneau 1991, 181-2)
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L’approche de Transition est « motivée par l’espoir, l’optimisme et l’action préventive »(Hopkins 2010, 133), ayant volontiers recours à des idées venues de la psychologie pour « exploiter la puissance d’une vision positive » tout en appliquant au pétrole des « acquis dans le domaine du traitement des dépendances » pour « aider le mouvement écologiste à comprendre le processus de changement »(Hopkins 2010, 92).
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C’est un peu la réponse de la Transition à la question angoissée de Charbonneau : comment faire accepter le demi-tour de la décroissance « sans faire sauter une machine organisée en fonction de tout autre principe ?
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* Le mot décroissance désigne en français deux choses :
∞ un phénomène économique qui touche des pays ayant connu de forts taux de croissance économique par le passé, lorsque d’autres pays (dits « BRICS » ou « émergents ») prennent la relève et accèdent à leur tour massivement à des ressources planétaires (minéraux, énergies fossiles, eau, sols, biosphère…) qui elles, n’augmentent pas ;
∞ un concept à la fois politique, économique et social selon lequel l’accroissement permanent de la démographie mondiale et la croissance économique censée en découler, ne sont pas des bienfaits pour l’humanité, mais représentent des dangers pour la paix, voire, dans les prévisions les plus pessimistes, pour la survie de l’Homo sapiens en tant qu’espèce, ce qui l’oppose au développement durable. Soutenu notamment par certains mouvements anti-productivistes, anti-consuméristes et écologistes, ce concept de « décroissance » est occasionnellement complété par des adjectifs tels que « soutenable » ou « convivial ». Une autre appellation, plus récente, est « objection de croissance ». Pour les « objecteurs de croissance », également appelés « décroissants », une réduction contrôlée de l’activité économique est la seule alternative à un krach mondial aux conséquences imprévisibles. Selon eux, les réalités physiques rendent impossible un développement économique infini, le taux de production et de consommation ne peut pas être durablement accru ni même maintenu, étant donné que la création de richesses mesurée par les indicateurs économiques comme le PIB repose sur l’exploitation et la destruction d’un capital naturel épuisable. Nous pourrions appeler aussi les « objecteurs de croissance »,* “Les créatifs culturels” car ils préférent les activités artistiques aux activités “Thermo-dynamiques”.♣
Le terme de décroissance peut être plus avantageusement remplacé par le terme de “transfert de croissance”, car il s’agit là de traduire la croissance à l’aune de nouvelles technologies, de nouvelles techniques, de nouveaux outils d’évaluation, profilant un véritable progrès technique basé sur la durabilité.
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On n’aura sans doute jamais assez de fermeté sur les fins et d’empirisme sur les moyens » (Charbonneau 2009, 122) pour « freiner une économie en chute libre sans faire exploser le moteur ou rentrer dans le décor », tout en s’efforçant de « réintégrer sans drame dans l’écosystème terrestre des monstres soi-disant urbains de plus de dix millions d’habitants ». Les méthodes psychologiques de Transition semblent faire leurs preuves pour éviter la panique et le défaitisme et inspirer le courage et la patience d’entreprendre cette manœuvre délicate d’une portée gigantesque par petits pas constructifs. Cela ne se fera pas en un jour comme ces révolutions qui, prétendant tout changer en un tour de main, sont sans lendemain. Qu’importe que celle-ci dure cent ans ou mille ans si elle rend le temps à la terre, c’est sa direction qui compte. Faire baisser le taux de croissance pour rétablir l’équilibre, comme l’écrit C. Amery, cela peut commencer dès à présent dans le cabinet de l’industriel, du savant ou du penseur révolutionnaire, au garage, à la table et au jardin du Français moyen, dans le champ de la communauté ou à la réunion locale du syndicat. La route infinie commence à nos pieds.(Charbonneau 2009, 205)
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10- Culture et identité terrienne
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Reprenons le discours de Jonathan DAWSON qui nous parle aussi du renouveau culturel. Jonathan DAWSON: “Moins un individu revendique pour lui-même le fruit de son travail, plus le bien-être de la communauté est important; autrement dit, plus il cède ses recettes à ses compagnons de travail et plus ses propres besoins sont satisfaits, non par son travail, mais par celui des autres. Le problème est au moins autant culturel qu’économique. Le concept d’unité dans la diversité est l’une des caractéristiques importantes de l’expérience communautaire. Au lieu de regarder la télévision, les écovillageois ont tendance à se tourner vers des activités locales : les chorales, les concerts, les troupes de théâtre.” Nous pourrions répondre à Jonathan DAWSON que ce qui pourrait fonder l’essence d’un renouveau culturel puise ses sources autant dans nos cultures ancestrales que dans les expressions les plus contemporaines de la pensée.
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En écologie, une approche holiste permet de mieux percevoir les interactions entre les êtres vivants et le reste de l’écosystème dont ils font partie. Un élément ou une entité (molécule, organite, hormone, organe, organisme, superorganisme, population, écosystème, biome etc.) se comprend selon sa position, ses relations et son activité au sein de l’organisme, du paysage ou de la biosphère. Deux principes illustrent le holisme en écologie :
-Changer tout élément affecte à terme le système.
-Changer le système affecte à terme tout élément.♠
*L’holisme ontologique est une conception selon laquelle un « tout » (organisme, société, ensemble symbolique) est plus que la somme de ses parties, ou autre qu’elle. Il faut rattacher à cette définition ce que l’on nomme « le principe d’émergence » : un « tout » n’est pas un simple agrégat. À partir d’un certain seuil critique de complexité, les systèmes voient apparaître de nouvelles propriétés, dites propriétés émergentes. Celles-ci deviennent observables lorsqu’elles vont dans le sens d’une auto-organisation nouvelle. De là découle le point de vue selon lequel c’est le tout qui donne sens et valeur à ses parties par la fonction que celles-ci jouent en son sein. C’est cette conception qui est à l’origine du développement des thèses du holisme épistémologique et du holisme méthodologique. Ces thèses rencontrèrent un très vif rejet dans les années 1950 (maccarthysme aux États-Unis) des chercheurs libéraux qui trouvaient cette thèse marxiste. Et depuis, le débat sociologique entre individualisme et holisme est toujours aussi vif.
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*L’ontologie est une branche de la philosophie concernant l’étude de l’être.
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Edgar MORIN: Edgar Nahoum, dit Edgar Morin, né à Paris le 8 juillet 1921, est un sociologue et philosophe français. Il définit sa façon de penser comme « constructiviste » en précisant : «je parle de la collaboration du monde extérieur et de notre esprit pour construire la réalité ». La morale non complexe obéit à un code binaire bien/mal, juste/injuste. L’éthique complexe conçoit que le bien puisse contenir un mal, le mal un bien, le juste de l’injuste, l’injuste du juste. Toute connaissance (et conscience) qui ne peut concevoir l’individualité, la subjectivité, qui ne peut inclure l’observateur dans son observation, est infirme pour penser tous problèmes, surtout les problèmes éthiques. Elle peut être efficace pour la domination des objets matériels, le contrôle des énergies et les manipulations sur le vivant. Mais elle est devenue myope pour appréhender les réalités humaines et elle devient une menace pour l’avenir humain. il propose Les Sept savoirs nécessaires à l’éducation du futur, une Conscience planétaire et une Politique de civilisation. Edgar Morin en appelle à une « prise de conscience de la communauté du destin terrestre », véritable conscience planétaire : « C’est en Californie, en 1969-1970, que des amis scientifiques de l’université de Berkeley m’ont éveillé la conscience écologique » rapporte-t-il, avant de s’alarmer : « Trois décennies plus tard, après l’assèchement de la mer d’Aral, la pollution du lac Baïkal, les pluies acides, la catastrophe de Tchernobyl, la contamination des nappes phréatiques, le trou d’ozone dans l’Antarctique, l’ouragan Katrina à La Nouvelle-Orléans, Fukushima l’urgence est plus grande que jamais ».
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En 2007, il est l’auteur de L’An I de l’ère écologique : la Terre dépend de l’homme qui dépend de la Terre. Cette conscience doit s’accompagner pour Edgar Morin d’une nouvelle « politique de civilisation », pour sortir de cet « âge de fer planétaire… préhistoire de l’esprit humain ». Selon l’auteur, une approche transdisciplinaire est indispensable si l’on veut aider les élèves à saisir les problèmes contemporains dans toute leur globalité et leur complexité. Or l’enseignement comme la modernité tendent au contraire à parcelliser et à compartimenter les savoirs, ainsi qu’à autonomiser les techniques à l’égard des préoccupations existentielles et humaines. Morin préconise par conséquent de rassembler des savoirs dispersés dans chaque discipline pour « enseigner la condition humaine et l’identité terrienne », ce qui aurait également pour avantage de développer chez l’élève les facultés de compréhension d’autrui. Plutôt que de réduire l’éducation à la transmission de connaissances établies, dans une conception souvent déterministe de l’évolution des sociétés, il juge préférable d’expliquer ce qu’il appelle « le mode de production des savoirs », ou encore la « connaissance de la connaissance ».
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*Le déterminisme est une notion philosophique selon laquelle chaque événement est déterminé par un principe de causalité.
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S’appuyant sur une vision cosmique de l’aventure humaine, où création et hasards jouent un rôle essentiel, il propose une philosophie de la « condition humaine » qui devrait servir de fondement à « l’identité terrienne » de l’Humanité. Cette identité intègre des préoccupations écologiques et humanistes. Morin, comme autrefois Auguste Comte avec sa religion de l’humanité, envisage donc quelque chose qui ressemble fort au projet d’une philosophie officielle, appelée à constituer le fondement philosophique et pédagogique de l’enseignement à l’échelle mondiale. Edgar Morin a créé en février 2008, l’Institut International de Recherche, Politique de Civilisation à Poitiers, ceci en étroite relation avec l’Espace Mendès-France et avec trois autres fondateurs. Il est allé en juin 2012 au sommet de la Terre dit « Rio+20 » où il s’est demandé dans quelle mesure il serait possible de créer un tribunal moral mondial pour juger les crimes commis contre l’avenir de l’humanité, et en particulier les crimes contre la nature, débat mené notamment avec le sénateur brésilien Cristovam Buarque et les juges Eva Joly et Doudou Diène
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9- Liberté et égalité
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Un autre point de vue est celui de CORNELIUS CASTORIADIS
CORNELIUS CASTORIADIS: (11 mars 1922 à Constantinople – 26 décembre 1997 à Paris) est un philosophe, économiste et psychanalyste français d’origine grecque.
Une société est considérée par Castoriadis comme hétéronome lorsqu’elle est instituée de telle façon à ce que ses normes sociales, ses lois et encore ses représentations du monde, au lieu d’être lucidement considérées comme des créations de la société elle-même (de « l’imaginaire collectif instituant »), sont au contraire attribuées à une source « extra-sociale », la plupart du temps transcendante. Ainsi, les sociétés hétéronomes sont celles qui se représentent leurs institutions et leurs valeurs comme indubitablement vraies et justes, estimant qu’elles possèdent un fondement absolu, celui-ci pouvant être Dieu ou les dieux, les Ancêtres, la Nature Humaine, ou encore, dans un registre plus contemporain, les « lois » de l’histoire ou de l’économie.
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Par opposition à une société hétéronome et à son « imaginaire », pour lesquelles les significations et institutions sociales sont posées comme indiscutables, une société autonome correspond pour Castoriadis à une société qui entame une dynamique « d’interrogation illimitée » sur ce que sont la justice et la vérité, à partir de la prise de conscience que toutes deux (justice et vérité) renvoient à des questions non susceptibles d’être résolues de manière définitive. En d’autres termes, une société ne peut devenir autonome que si elle (ses membres) entretient un rapport lucide à ses significations imaginaires sociales et à ses institutions, et donc, selon Castoriadis, si elle se reconnait elle-même comme à l’origine de celles-ci, plutôt que d’instituer la croyance selon laquelle elles proviendraient d’une source extra-sociale incontestable (divinités, lois économiques ou lois de l’histoire, etc.). C’est en ce sens que Castoriadis parle de la “rupture de la clôture de l’imaginaire institué” (ou “clôture du sens”), celle-ci qui garantissait comme vraies et justes les normes sociales établies. Par là, se comprend aussi l’idée qu’une société autonome, est celle qui se confronte lucidement au “Chaos/Abîme/Sans-Fond” qu’elle représente pour elle-même, et que le monde représente en tant qu’il ne nous fournit aucune norme ni aucun critère objectif pour l’institution de la société.
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*l’imaginaire social, qui crée le langage, qui crée les institutions, qui crée la forme même de l’institution chaque fois que des humains sont assemblés, se donne à chaque fois une figure singulière, instituée, pour exister, cet imaginaire est pensé sous deux aspects: l’imaginaire social instituant d’une part, qui correspond à l’activité et œuvre créatrice en elle-même, et d’autre part l’imaginaire social institué, qui désigne le résultat de cette activité créatrice, soit les institutions et significations sociales (normes, langage, lois, représentations, et encore, parmi ce qu’il entend par institutions, « [les] outils, [les] procédures et méthodes de faire face aux choses et de faire des choses, et, bien entendu, l’individu lui-même »…)
*Clôture de l’imaginaire institué: Castoriadis estime qu’aucune clôture représentationnelle et institutionnelle ne peut être absolue, ni donc entraîner l’inertie totale d’une société (sa reproduction à l’identique indéfiniment)
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Cette rupture, Castoriadis la rapporte à deux activités qu’il associe sans cependant les confondre: la philosophie, ayant pour objet la question de la vérité, et la politique, concernant la question de la justice. Une société est donc autonome si, sachant qu’elle est à l’origine de sa propre création, elle est capable de s’interroger en permanence sur la validité de ses institutions, de ses lois, de ses normes, et par suite, de les transformer. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle Castoriadis emploie le terme d’autonomie, dont il rappelle l’étymologie, “auto-nomos”, qui renvoie à l’idée d’une création lucide et réflexive du nomos de la société (lois, normes, etc.). Il affirme en ce sens qu’« être autonome, pour un individu ou une collectivité, ne signifie pas « faire ce que l’on désire », ou ce qui nous plaît dans l’instant, mais se donner ses propres lois. ». En effet, Castoriadis considère que la détermination de normes et de lois est une pratique inhérente à toute société humaine, et estime que l’idée d’une société sans pouvoir est une fiction, qu’il y a toujours du pouvoir au sein d’une société, quand bien même celui-ci serait tellement intériorisé par les individus qu’il ne se manifesterait pas explicitement au travers d’une hiérarchie sociale marquée. Il s’agirait donc non pas de lutter contre toute forme de pouvoir, mais de faire en sorte que ce pouvoir soit partagé par tous. De ce fait, une société démocratique, autrement dit autonome, est selon Castoriadis une société qui pose l’égalité des citoyens comme la condition de possibilité de leur liberté… Liberté et égalité ne s’opposeraient donc pas mais seraient au contraire deux notions indissociables: on ne peut être dit libre, d’après Castoriadis, que si l’on n’est dominé par personne, si donc personne n’a plus de pouvoir que soi pour décider des règles communes qui nous concerneront.
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Il associe ainsi la démocratie à la nécessité d’instaurer une véritable sphère publique, qu’il nomme sphère publique-publique ou ekklesia, qui correspond aux institutions du “pouvoir explicite” (institutions politiques), et qui doit donc selon lui véritablement appartenir à tous les citoyens, et non être “privatisée”, que ce soit par une élite politique, une bureaucratie, ou quelconques experts – experts qui pour Castoriadis, ne sauraient exister dans le domaine politique
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8- Du changement social dans la société technologique
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Jonathan DAWSON nous parle de notre rapport au pouvoir.Jonathan DAWSON: “Trouver des formes de gouvernance favorisant l’intégration est l’une des tâches les plus difficiles à laquelle les écovillages doivent faire face. Il faut promouvoir une culture basée sur la confiance et la compassion, créer des procédures de prise de décision efficaces et gérer les conflits. Dans la plupart des écovillages, la prise de décision s’effectue sur la base du consensus : aucune décision n’est prise tant que l’on n’a pas atteint la quasi-unanimité. Plus l’écovillage est petit et plus il y a de chances pour que tous les membres soient impliqués dans le processus de prise de décision. Plus les communautés grandissent en taille et en complexité et plus ce sera difficile.”
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Sur ce rapport au pouvoir ce sont HERBERT MARCUSE et CORNELIUS CASTORIADIS qui nous en donnent des clefs…
HERBERT MARCUSE: né le 19 juillet 1898 à Berlin et mort le 29 juillet 1979 à Starnberg (Bavière), est un philosophe, sociologue marxiste, américain d’origine allemande, membre de l’École de Francfort avec Theodor Adorno et Max Horkheimer.
HERBERT MARCUSE nous rappelle le caractère oppressif et destructeur du capitalisme industriel avancé dont la survivance repose sur la destruction systématique du cadre de vie des peuples non industrialisés et sur la violence institutionnelle et guerrière perpétrée à la périphérie du monde capitaliste. Dans L’homme unidimensionnel, Il avance que ce qu’il appelle la « société industrielle avancée » crée des besoins illusoires qui permettent d’intégrer les individus au système de production et de consommation par le truchement des mass media, de la publicité et de la morale. La conséquence en est un univers de pensée et de comportement « unidimensionnel », au sein duquel l’esprit critique ou les comportements antisystémiques sont progressivement écartés. À l’encontre de ce climat ambiant, Marcuse se fait le champion d’une « négation intégrale » (great refusal), seule opposition adéquate aux méthodes de contrôles de la pensée en cours. Au-delà de l’homme unidimensionnel, comment aller vers sa libération?
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A cette question fondamentale, qui entraîne celui des moyens de la transformation sociale, Marcuse tente d’y répondre en affirmant tout d’abord les fondements biologiques , c’est à dire psycho-émotionnels, du socialisme et la nécessité d’une nouvelle sensibilité à dimension ludique, hédonique, esthétique en révolte contre la raison répressive et invoquant le pouvoir émancipateur de l’imagination. Il dresse enfin un tableau, plus sociologique, de la transition vers une société désaliénée en cherchant à définir la base sociale d’un mouvement radical d’opposition au capitalisme avancé.
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*La notion d’aliénation (du latin : alienus, qui signifie « autre », « étranger ») est généralement comprise, en philosophie, comme la dépossession de l’individu, c’est-à-dire sa perte de maîtrise, de ses forces propres au profit d’un autre (individu, groupe ou société en général). Il renvoie ainsi fréquemment à l’idée d’une inauthenticité de l’existence vécue par l’individu aliéné. Ce terme est à l’origine un terme juridique, se rapportant à un transfert de propriété. Contrairement à Freud, qui voyait dans le principe de réalité la nécessité de la sublimation répressive des désirs, Marcuse dénonce l’inhumanité du principe de réalité répressif, qui n’est autre que le principe de réalité de la société en place. Il préconise, au contraire, l’éclosion des désirs, la transformation de la sexualité en Eros, l’abolition du travail aliéné et l’avènement d’une science et d’une technique nouvelles, qui seront au service de l’être humain. Il ne remet pas en question l’essentiel des théories freudiennes, il les complète, plutôt, en les adaptant à son temps et en les libérant d’une conception bourgeoise de la société pour les rendre émancipatrices et véritablement universelles.
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*Dans la psychanalyse freudienne, le principe de réalité désigne la capacité d’ajourner la satisfaction pulsionnelle. Le principe de rendement est le principe de réalité d’une société capitaliste fondée sur la résignation, la falsification des instincts et la répression des potentialités humaines.
*La sublimation est un mécanisme psychologique qui vise à transcender le réel, c’est-à-dire à en sortir, à le dépasser. Selon Freud, la sublimation sert notamment à évacuer des pulsions violentes sous une forme constructive, changer une pulsion de mort (thanatos) en pulsion de vie (éros). les arts sont une forme de sublimation. C’est donc une façon d’érotiser notre environnement immédiat face aux agressions morbides du monde extérieur (rapport de domination, d’exploitation, violence, laideur de l’architecture, etc.) qui rendent notre vie quotidienne insupportable et font naître en nous des sentiments violents et/ou autodestructeurs (thanatos – pulsion de mort). Si la sublimation sous-entend une distanciation face au monde réel, (cette fameuse idée de transcendance à travers l’érotisation), la dé-sublimation c’est excatement l’inverse. Marcuse donne en exemple la sexualité dans la société industrielle avancée. Au lieu d’une sublimation par la sensualité, par l’érotisation de l’environnement immédiat, la sexualité est désublimée, c’est-à-dire que toute l’énergie érotique est concentrée dans l’acte sexuel et sur les zones érogènes du corps. C’est une satisfaction immédiate des pulsions sexuelles, sans médiation, une intensification de la libido (énergie sexuelle), mais également un rétrécissement de son étendue et de la variété des plaisirs possibles.
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Selon Marcuse, ce modèle de désublimation, de satisfaction immédiate des désirs, s’est répandu dans toute la société, encouragée par le pouvoir qui y voit une excellente façon de perpétuer sa domination. En effet, si la sublimation est un refus du monde donné et une façon de le transcender par l’érotisation, la désublimation est une soumission aveugle aux pulsions et donc une plus grande acceptation de l’état des choses sans remise en question. L’art semble ainsi être la voie la plus sûre de notre épanouissement. Il existe ainsi des domaines au sein de nos sociétés qui ne subissent pas la répression. Marcuse va même jusqu’à dire que l’art n’est pas une sublimation pulsionnelle, comme le pensait Freud. Non, pour Marcuse le « travail artistique » est une libération, dans le sens où les pulsions n’y sont pas canalisées dans le but de servir la société. Il s’agit aussi de redonner son importance à l’imaginaire (espace protégé des tourments externes, il reste fondamental dans notre psychisme, notamment pour lier les couches de l’inconscient), dans le but d’écarter le travail de la sphère de la nécessité (pour que l’individu n’agisse plus dans l’angoisse). Marcuse reprend dans cette optique de désublimation non-répressive du travail et de revalorisation de l’imaginaire, la pensée nietzschéenne et schillérienne : pour une « liberté de jouer.» Il rappelle que la réalité devrait perdre de son caractère sérieux, pour donner plus de liberté à l’individu d’exploiter son potentiel imaginatif. Nous perdrions par là même de notre gravité face à la mort proportionnellement à la perte du caractère sérieux de la réalité et cela chamboulerait par là même ce fameux «Pari de Pascal» à propos de la croyance en l’existence ou non d’un dieu et du rapport à un châtiment probable. Ainsi le lieu de la perdition: « l’enfer», ne serait plus la seule conséquence d’une sentence capitale, (nous avons pris conscience aujourd’hui de notre responsabilité face au devenir de notre planète) et les enjeux sur le sens du destin s’il en est, se combinerait et se neutraliserait alternativement dans une dialectique de la scolastique au travers du jeux et du hasard. Marcuse va néanmoins beaucoup plus loin que Freud lorsqu’il tente de penser une « sublimation non répressive » des pulsions.
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Il est important pour les mouvements écologistes aujourd’hui, car il fut l’un des seuls à penser qu’une société non-répressive impliquait aussi un changement dans les techniques, là où Marx pensait qu’un changement dans les rapports de production était suffisant. H. Marcuse c’est celui qui a pensé le problème du changement social dans la société technologique.
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7- Du design d’éco-village au design global
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Reprenons; le design vient du mot designare, qui signifie à la fois “designer, signifier, tracer, marquer, dessiner, montrer, indiquer, produire, ordonnancer” ; c’est une manière d’être pour améliorer les espaces de vie et de travail, les produits, les codes et les signes dans une démarche industrielle où créativité, innovation, beauté et fonctionnalité s’associent étroitement à l’aide de valeurs et contraintes, de la conception à la réalisation et la production.
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Le design global est une démarche créative qui permet à une entreprise d’adopter une conception transversale et plus cohérente dans ses méthodes de communication pour atteindre une meilleure représentation et efficacité.C’est une méthode qui permet à l’entreprise d’évoluer, en sondant chaque étape de son développement, afin de vérifier ses capacités d’innovation et son aptitude à répondre à de nouvelles demandes par une force de proposition qui respecte la cohérence globale voulue.
Le terme « design global », émergent en France, est amené à se développer. Le premier exemple est la nécessité de plus en plus courante des agences de communication à ajouter à leurs compétences celles d’un architecte d’intérieur ou d’un styliste. On remarquera aussi la création de cursus universitaires comme le design d’espace, lié à ceux du stylisme et de la communication visuelle.
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Mon travail se situe dans la perspective d’un Design global à dimension publique, Un Design global à l’échelle planétaire, local-global
Ce genre d’idée part d’une intuition longuement mûrie, cela peut prendre des décennies (Octave Nitkowski enfant jouait avec son frère aux playmobils qu’ils utilisaient pour créer de nouvelles institutions politiques). Que fera-t-il de cette sensibilité à l’âge mûr ? Cela pourrait s’inscrire dans le roman social d’anticipation. Et dans le roman social d’anticipation le temps finit toujours par vous rattraper . Mon intuition première c’est que nous avons du mal à nous fixer les rapports d’échelle.
L’échelle, la vraie dans mon roman social c’est le quartier et le monde, et le dilemme de l’artiste c’est de devoir justifier de sa fonction sociale et de retrouver une proximité avec le public. Son rôle ne serait-il pas de s’impliquer dans l’élaboration d’une nouvelle conscience collective et pour ce faire, aborder le travail collectif justement. Nous sommes à l’époque des réseaux et cherchons naturellement un rapprochement avec la nature. La forêt qui pousse en silence ce sont les milliers d’initiatives à travers le monde d’éco-villages, d’écoquartiers urbains et de communautés d’initiatives de transition. Ne serait-ce pas là le commencement d’un cyber-romantisme ? Nous en sommes là, à l’heure d’un choix pas si compliqué que ça, passer en mode éco-citoyen du monde. Dans la pensée contemporaine nous pouvons trouver toutes les réponses à nos questions pour nous construire un avenir et réussir la concorde sociale, mais le chantier est immense.
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* Une ville en transition est une ville dans laquelle se déroule une initiative de transition, c’est-à-dire un processus impliquant la communauté et visant à assurer la résilience (capacité à encaisser les crises économiques et/ou écologiques) de la ville face au double défi que représentent le pic pétrolier et le dérèglement climatique.
*Concorde sociale: Union des cœurs et des volontés, qui produit la paix.
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Je m’appuie sur le discours de Jonathan DAWSON président du Global Ecovillage Network (Le grand réseau des écovillages dans le monde), point de départ d’une véritable expérience humaine tournée vers l’avenir. Jonathan DAWSON: “Depuis la fin des idéologies (libéralisme et marxisme), nous essayons de trouver un paradigme qui nous assemble durablement. Nous l’avons trouvé avec les communautés de résilience, non centrées sur l’individu, la tribu ou l’Etat. Ce paradigme porte des noms différents, Communautés intentionnelles ou Ecovillages ou Agenda 21 local ou Towns transition ou Plan climat ou Cités jardins… La profusion des termes montre la richesse de cette alternative à la société thermo-industrielle dominante. L’intérêt principal des communautés de résilience, c’est qu’il ne s’agit pas d’une nouvelle idéologie, mais d’une pratique : comment faire en sorte que sa communauté d’appartenance puisse faire face prochainement aux chocs que sont l’épuisement des ressources fossiles (le pic pétrolier…), le réchauffement climatique, l’éloignement de l’homme par rapport à la nature.”
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* Une communauté de résilience est un groupement de personnes structuré et organisé pour s’adapter rapidement au changement, surmonter un traumatisme, tout en maintenant sa cohésion et des relations ouvertes avec le reste du monde.
*société thermo-industrielle “qui a choisi la chaleur comme seul moyen de puissance”.
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Il préconise “Une rupture avec l’organisation sociale actuelle” Jonathan DAWSON: “Notre époque est marquée par une rupture profonde du tissu communautaire dans les pays riches du Nord et dans le monde entier. A la fin des années 1980, le déclin en termes de qualité de vie était tangible. L’augmentation des taux de criminalité, de dépressions, de consommation de drogues et de suicides indique très clairement l’anomie croissante vécue par beaucoup. Jamais les écosystèmes n’ont été aussi menacés. Ces cinquante dernières années ont été le théâtre du démantèlement des structures et des connaissances dont nous avons besoin pour survivre. L’intégrité des communautés est passée sous le rouleau compresseur des politiques économiques favorisant la production et la distribution de masse ainsi que la libre circulation des capitaux dans le monde. La société actuelle est à peine capable de satisfaire à ses besoins essentiels à l’aide des compétences, des ressources et des matériaux disponibles localement. Construire ensemble une transition est le grand défi qui attend notre civilisation.”
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*L’anomie (du grec / anomía, du préfixe – a- « absence de » et/ nómos « loi, ordre, structure ») est l’état d’une société caractérisée par une désintégration des normes qui règlent la conduite de l’humain et assurent l’ordre social.
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Ainsi au cours de la conférence “UN habitat” à Istanbul en 1996, le GEN (Global Ecovillage network) naquit. Il s’agit d’une confédération mondiale de personnes et de communautés qui partagent leurs idées, échangent des technologies et mettent en place des échanges culturels et éducatifs. Le premier T-shirt du GEN portait en gros caractère la mention Welcome To The Future
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6- Une architecture aboutie, auto-construite, autosuffisante
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Sur ce point le programme de l’Internationale Situationniste en 1972 prévoyait de mettre en œuvre des moyens et des méthodes artistiques, non pas pour produire de l’art ou critiquer la politique, mais pour produire de la réalité. La vie réelle de l’individu se concrétise dans son quotidien. C’est seulement dans la subjectivité vécue qu’il peut retrouver la vie dont le spectacle et le spectacle de l’art l’a dépossédé. Partons donc du principe qu’une révolution qui ne changerait pas fondamentalement la réalité quotidienne de tout un chacun ne serait ni plus ni moins qu’une nouvelle forme de domination et de spoliation.
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Un rapport d’échelle et de moyens se pose alors, du parlement de quartier aux institutions nationales: Le revenu universel d’insertion. Le partage du travail – que l’on doit toujours entendre dans le sens de partage du travail salarié est une façon de relever le défi de la transformation de notre structure de travail basée sur l’emploi en une structure de travail autonome: une structure mieux adaptée à l’exécution des tâches non-programmables qui constituent la véritable demande de travail d’une société post-industrielle. Il s’agit de travailler plus et de travailler mieux.Travailler plus, globalement, parce que le travail partagé fait que l’on travaille tous. On réintègre les chômeurs, les assistés sociaux et les décrocheurs, ceux qui cessent de participer, les “déserteurs par résignation” de la population active. Ce qu’on veut, c’est un travailleur libéré des heures salariées et qui devienne productif hors de la structure des emplois, productif comme travailleur autonome dans des activités non-programmables qui correspondent vraiment à la demande. Un emploi à temps plus ou moins complet en échange d’un salaire garanti; sous la forme, durant la partie de son temps dont il a été libéré, d’un effort d’apprentissage ou d’un travail en parallèle comme travailleur autonome. C’est cette double approche qui permet de financer la transition. Quand la solidarité le sous-tend au palier des besoins essentiels et qu’il offre à chacun une chance égale de réussir en fonction de ses efforts, le système de libre entreprise dans un contexte d’économie sociale et solidaire est sans doute le meilleur des systèmes économiques.
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*Définition des activités non-programmables: activités théoriquement non rentables pour une entreprise de type classique (du point de vue du modèle horaire et contractuel), mais non moins vitales pour la bonne santé du tissu social.
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Pour en revenir sur l’impossibilité d’instituer au niveau d’un parlement de quartier un revenu universel d’insertion, la responsabilité de ce parlement de quartier est dès lors de mettre en oeuvre les conditions d’une réponse globale et universelle aux conditions de vie : logement, alimentation, habillement, objets de la vie courante à tout à chacun librement. Pour la réalisation de ces conditions, j’imagine une architecture non pas issue d’une Re-Renaissance mais une architecture aboutie, auto-construite, autosuffisante avec son service public d’échanges (Banque de temps ect…), sa ressourcerie, sa plateforme de mobilité, son Phalansthère écolieu consacrant l’évidence du parlement de quartier, agora vivante, palpitante jour et nuit, capable d’abriter, de nourrir, de prendre soin d’une parcelle représentative du monde. Cela prendrait la forme d’une ONGE abritant l’université populaire, le bureau de design global et le parlement de quartier formant une entité “L’écolieu” inséré dans le réseau globalisé.
Peu importe la structure à l’origine d’un mouvement de la pensée du global-local éco-citoyenne du monde, elle est appelée à se modifier autant que nécessaire. Le seul but étant notre émancipation d’un ordre financier pour une nouvelle politique de civilisation introduite par Edgar Morin.
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5- Démocrasite.com et Design global !
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Pour en revenir à l’idée d’un projet collectif comme celui d’un Design global (local-global), Il s’agit entre autres, de penser et réorganiser son quartier comme le ferait un jardinier japonais à l’aide d’une véritable pensée écologique. Un directeur artistique qui prendrait cette charge, tel un Asger Jorn devant un Bauhaus imaginiste international situationniste, ne pourrait l’assumer seul. L’université populaire de par son histoire est totalement légitime dans cette fonction à ouvrir les portes du savoir à tout être humain désireux de se forger à la pensée écocitoyenne du monde. Elle aurait un rôle fondamental dans l’apport de données et de matières premières au collectif d’artistes ayant pris en charge ce projet de bureau de design global public sous forme de contraintes et d’exigences au projet collectif.
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Dans ce cas il s’agit d’aborder directement une pensée alternative, de réfléchir au processus d’autonomisation individuelle et collective et d’entamer des processus qui mènnent à la résilience collective tout en adoptant la philosophie du grand refus à la pensée dominante. Le verdict est unanime au regard du panthéon des penseurs de l’universalité. Nulle solution alternative sans démocratie directe, sans mise en oeuvre effective d’un pouvoir transversal. Un tel projet comme le design global ne peut exister sans son parlement de quartier. Quel impact environnemental le développement de tel réseau nécessaire à l’élaboration de ces parlements de quartier à travers le monde peut-il avoir ? Il s’agit bien de développer dans ce cas une science des réseaux. Le pionnier de la structure holoptique de réseau est Jean-François Noubel. Chercheur, professeur et formateur en intelligence collective globale et fondateur du site thetransitioner.org, il s’inscrit dans la mouvance émergente des créatifs culturels qui tend vers une organisation sociale non pyramidale, soucieux d’une écologie à la fois de l’individu physique et spirituel, de la société et de l’environnement. Il y a aussi l’épistémologie complexe d’Edgar Morin qui se veut ouverte sur un certain nombre de problèmes cognitifs clés et se propose d’examiner non seulement les instruments de connaissance en eux-mêmes, mais aussi les conditions de production (neuro-cérébrales, socio-culturelles) des instruments de connaissance. Donner pleine réalité à la noosphère, c’est reconnaître la vie et l’existence objectives des idées. Les considérer sous l’angle de leur organisation, c’est permettre l’élaboration d’une science des idées ou noologie.
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C’est ainsi que le design global introduit à la science de la représentation.Celle des écosystème biologiques et sociaux dans leurs interactions. Celle des réseaux dans leur dynamique, et celle de la représentation que nous nous faisons nous-mêmes collectivement. C’est aussi une science de l’agrégation des compétences pour que chacun y trouve sa place et y apporte son vécu, (l’exemple du Parlement des invisibles de Rosenvallon ou bien l’artiste JR). C’est la proposition d’un cyber-romantisme. C’est une science de l’appropriation des canaux média. C’est un projet d’urbanisme, d’architecture de paysage, d’architecture dite positive, de design de vie, d’objets, de techniques (à ce propos le fait de se doter d’une instance techno-scientifique au sein du bureau de design global est essentiel), de transformation de notre environnement urbain vers des écosystèmes naturels d’un bout à l’autre de notre cadre de vie et des écosystèmes humains vers la résilience.
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C’est penser le recyclage total et ce qu’il produit dans notre quotidien. C’est une science de la projection des idées. Le bureau de design c’est entre autres, la maîtrise de la modélisation des interactions de phénomènes hétérogènes concourant à l’autonomie.
Il faut ouvrir les espaces et les perspectives du quartier, renouer avec l’hospitalité, savoir accueillir le voyageur et le migrant, relier les générations, relier les scolarisés et les sédentaires dépendants avec le nomade et les groupes de vie communautaires.
Il faut imaginer le nomade parcourant un champ ouvert suivant une ligne différen-iante de répétition. Il se déplace sur un territoire parfaitement inconnu sans se perdre. Ce n’est pas l’extravagant c’est bien l’expérimentateur et, de ce fait, le résistant qui sait créer, sans voiler les intérêts par les principes, tout en travaillant à vaincre l’angoisse des lendemains dans l’autonomie visée. Le nomadisme se présente comme un “horizon sans toit”, fracture virtuelle, ouverture des lieux, et est synonyme d’une pérégrination qui fortifie les rencontres, multiplie les évènements et adosse la croyance au monde. Cette philosophie soulève la question éthique essentielle d’une action obéissant aux valeurs suprêmes de la liberté, de l’équité, de la vérité, et de la double solidarité biologique et culturelle, s’organisant dans la coexistence des échanges et des donations de sens. La force positive ou utopique d’un concept philosophique dans Ie contexte de la nomadologie peut être mesurée selon deux axes: 1. sa capacité d’intervenir dans ce concept et de transformer nos habitudes de penser et de désirer; 2. sa capacité de donner expression à un devenir ou un mouvement social et alors de prolonger ou augmenter la force sociale de ce devenir, voire la faire propager à d’autres champs sociaux, la faire connecter avec d’autres devenirs. les engagements de la citoyenneté nomade sont pour ainsi dire horizontaux, par contraste avec les engagements verticaux de la citoyenneté normale: les citoyens nomades s’engagent directement avec d’autres gens et d’autres groupes, plutôt qu’avec l’Etat.
La pensée produite par l’université populaire au travers de l’interdisciplinarité induit une telle formulation plastique du projet de société proposé ensuite par le bureau de desing global discuté collectivement par le parlement de quartier jusqu’au consensus permettant ainsi l’action ou la revendication.
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4- Le retour au local est incontournable
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Pour Laurent Gervereau le retour au local est incontournable et impose à l’individu une réflexion sur ses choix. Le phénomène inédit réside dans la diffusion massive de produits partout dans nos vies, nos actes d’achat comme notre capacité d’informer changent totalement le paysage, dès lors que chacune ou chacun a compris son pouvoir. Il est temps en effet de comprendre la nécessité des équilibres sociaux, du micro-quartier aux continents. Tout autre modèle se révèle d’ailleurs contreproductif et explosif. Pourquoi ne pas comprendre la nécessité d’une fédération planétaire relevant de toutes ces structures et apportant des règles consenties de base en liaison avec la perpétuation collective ? La grande révolution à venir est en fait le réveil des individus en réseau prenant conscience de leur pouvoir sur le « visible », sur leur environnement immédiat. Le niveau local devient l’enjeu fondamental du monde à venir, pas un local fermé sur lui-même et émietté mais un local en dialogue mondial constant : local-global ou micro-macro. L’économie est une technique. Nous avons inversé les priorités en mettant les techniciens comme décideurs : la maison doit être construite sous les ordres de l’architecte, pas du plombier. Il faut remettre l’économie sous la volonté politique. Le retour au local, (« j’aime où je vis ! »), forme alors l’enjeu central de débats idéologiques de demain. Un retour réactionnaire ou un retour tourné vers le futur. Voilà le terrain politique à occuper pour briser la séparation totale entre les citoyens et le choix de leur vivre-en-commun.
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Les écovillages sont aussi confrontés à leur isolement et leur manque d’intégration au tissu de leurs propres biorégions. Les participants ne possèdent que peu de bras et luttent énormément pour se maintenir à flot. Il ne leur reste alors que peu de ressources à investir au service d’une cause plus vaste. Il semblerait que la réponse à cette situation d’usurpation de nos intérêts par la sphère financière soit dans la revendication politique: Droit au Boycott, Droit de décider des technologies futures, Tribunal moral mondial pour juger les crimes commis contre l’avenir de l’humanité, (voir: certains semenciers criminels et les brevetages du vivant) Les revendications locales portées au niveau national et international comme par exemple, un statut pour la vie en nomade, habitat en structure légère etc.
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Mais aussi l’organisation d’alternatives vers l’autonomie alimentaire, passage obligé vers la libération de l’esprit de ses angoisses du ventre. Il faut suivre les recommandations de Pierre Rabhi, Masanobu Fukuoka et Jeremy Rifkin qui nous conduisent vers l’autonomie effective.
Le problème c’est le déluge de messages médiatiques qui ont ébranlé les valeurs traditionnelles et les modes de vie dans le monde. Au Nord, les efforts pour plus d’autosuffisance et de modération ont été balayés par la norme culturelle dominante selon laquelle la qualité de la vie est assimilée aux niveaux de consommation matérielle. L’individualisme croissant de toute la société se reflète au sein des écovillages eux-mêmes. Les individus aspirent à construire leur propre maison et revendiquent plus d’espace privé. Faute de modèle communément reconnus, chaque nouveau groupe est contraint de réinventer la roue”. La voie salvatrice qui nous est donnée c’est surtout le “Grand Refus” d’Herbert Marcuse mais il ne doit pas faire penser à une formulation explicite d’une politique concrète: il s’agit essentiellement d’un discours éthico-philosophique, que certains qualifient d’idéologique, étroitement associé à une revendication hédoniste et à des préoccupations esthétiques.
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Les écovillages ne se sont pas développés autant que ce qu’on espérait. Pour gérer la pénurie énergétique à venir, les communautés n’auront pas d’autre choix que de suivre le chemin que les écovillages auront été les premiers à emprunter.
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